Emoi et moi

chut

Cette nuit, j’ai rêvé que j’étais l’assistante de l’imprimeur du Pape François et que je me retrouvais dans la chapelle très privée de la Pietà au cœur de la basilique St Pierre de Rome à quelques centimètres de la magnifique œuvre du même nom sculptée par Michel Ange himself et que le Pape me montrait la Bible sur son autel en me disant que non, décidément, l’imprimeur ne faisait pas du bon boulot, les interlignes étaient trop petits, le texte trop concentré et que la police d’écriture était d’une banalité affligeante. Bref, le Pape m’engageait à reprendre tout le travail et à réimprimer dans sa totalité…

la Bible !

Inutile de vous dire que je me suis réveillée épuisée avant même d’avoir commencé ma journée ne sachant comment j’allais pouvoir arriver à mener cette mission à bien et surtout en informer l’imprimeur sans blesser son ego. C’est d’ailleurs plus ce dernier point, dans mon rêve, qui générait une réelle angoisse plutôt que l’ampleur de la tâche en elle même.

Dans ce songe s’est donc mêlé ce que j’ai retenu d’un reportage passionnant diffusé le 5 mars dernier sur France 3 intitulé « au cœur du Vatican » et mes activités du moment qui m’engagent à réfléchir et rédiger en groupe de travail dans le consensus.

Un petit rappel de la définition du mot ?

Un consensus est un accord général (tacite ou manifeste) parmi les membres d’un groupe, pouvant permettre de prendre une décision sans vote préalable.

Travailler donc dans le consensus avec des personnalités que l’on ne peut gérer, car on ne les connait pas plus qu’elles ne nous connaissent, requiert selon moi un sens inouï de l’adaptation et de l’équilibrisme. Pourquoi ? Parce que susciter l’intelligence collective demande du tact, beaucoup de tact.

consensus

Je partage la thèse de Sylvaine Pascual, spécialiste du plaisir au travail, Conseil en relations humaines et reconversion professionnelle, qui défend l’idée que l’ego peut être un frein important à l’intelligence collaborative.

De même, travailler en groupe, implique un effort énorme qui doit contrebalancer le fait que penser à plusieurs “affaiblit la créativité et les capacités intellectuelles”.

Pourquoi ? Parce que les conditions habituelles du travail collectif génèrent davantage de craintes que de confiance mutuelle, libérant au passage toutes les expressions négatives de l’égo, frein majeur au travail collaboratif.

Toujours selon Sylvaine Pascual, « le groupe peut donc être contre performant dès lors qu’il est pollué par les jeux de pouvoir et les rôles relationnels, bref, par les besoins non identifiés et mal comblés qui laissent l’égo s’exprimer au détriment de l’estime de soi de chacun, de la confiance mutuelle et de la libre expression au sein du groupe. Tout cela pouvant entrainer des mises en retrait, des conflits ouverts ou larvés, des inimitiés, des incompréhensions, des tensions qui favorisent la méfiance et limitent l’expression désinhibée et la possibilité du groupe à produire et/ou des velléités de prises de pouvoir. »

Pour ma part, j’adhère au principe d’authenticité qui a pour objectif d’abandonner la culture du non-dit (mensonges, omissions, rétention d’informations, secrets, sentiments retenus…) au profit d’une culture du parler vrai dans tous les instants de la collaboration.

Cette même attitude que certains considèrent comme du parler « sans filtre » et qui peut irriter car ressentie comme de l’arrivisme ou de l’égo mal placé.

Je crois qu’une liberté d’expression, favorisée au bénéfice d’une idée, canalisée et bien accompagnée génère tôt ou tard une motivation à coopérer pour une plus grande performance collective.

Enfin, le principe de responsabilité qui consiste à placer chacun devant sa propre responsabilité à assurer ses choix et en assumer les conséquences qui en découlent est également à privilégier.

Clarifier les rôles et les responsabilités de chacun pour éviter ambiguïtés et confusions, placer chaque personne devant ses engagements, sont de nature à favoriser ce principe.

L’imprimeur de la Bible acceptera t-il les remarques du Pape venant de moi, femme et de surcroît plus jeune ?

Il est certain que si le Pape les lui avait transmises avec toute sa légitimité de chef visible de l’église catholique, elles auraient été reçues différemment.

Je fais le choix d’assumer ma tâche, même ingrate, car pour le Pape, seul le résultat final est important, n’est ce pas ?

Si NOUS parvenons à sortir de cette aventure avec un projet qui tient la route, ce sera une extraordinaire expérience qui démontrera que les idées et la mise en commun des compétences sont les piliers du groupe et que les personnalités très hétérogènes qui le composent, peuvent parvenir à se concentrer sur l’essentiel dès lors que la cause a un réel bien fondé.

Mais « wait » ! Ce n’était qu’un rêve…

« La meilleure façon de réaliser ses rêves est de se réveiller ».
Paul Valéry